Des yeux de nuit

RICHEZ

Des yeux de nuit est le journal de voyage d’une européenne dans l’Inde profonde. La révélation d’un monde totalement déconcertant, effrayant où elle perd ses repères. On pourra comparer ce livre au magnifique Nocturne indien, de Gérard Corbiau (également réalisateur de L’Année de l’éveil d’après Charles Juliet). Une dangereuse plongée dans un monde fascinant et dévorant.

De rencontre en rencontre, la narratrice se découvre étrangère à celle avec qui elle s’était identifiée. Citons la rencontre mystérieuse qui donne son titre à l’ensemble du récit : « À tes côtés, La femme qui mange sans cesse le temps. Celle-là que l’on disait sauvage. De loin, la foule l’observait, craintive. (…) Elle disait : ‘Chaque fois que j’ai appris, tout semblait immobile.’ Et puis : ‘Avec moi, tu sauras pourquoi tes pas t’ont conduite jusqu’ici. Nue parmi les épines admirables. Face aux regards les plus épuisants, les plus crûs ! La lumière est obscure. Ouvre tes yeux de nuit !’ »

Texte d’une écriture riche et maîtrisée, qui rend admirablement la force sauvage et l’énigmatique beauté des paysages et des hommes de ce pays-continent.

Citons ici les premières phrases du texte, qui évoquent tout à la fois la mélancolie d’un Jack Kérouac et la magie d’Henri Michaux : « La marée haute remontait la rivière sur des kilomètres, mêlant les sables d’or aux terres rouges. Lauriers cendrés. Chapelets de graines de rudraksha aux contours de cerveaux. La peau du tigre mort contre ta joue. C’était quoi, cette vie ? Ce déploiement de couleurs et de sons, ce jeu distribuant les actes et les rôles d’une pièce de théâtre close où le texte nous porterait sans la moindre invention. »

♦♦♦ Lire l’article de François Lallier

Coll. Les Vies imaginaires – 2001 – ISBN 978-2-908-82586-2 – 11,43 €