Lucarnes

Après Le Vol du loriot (2005), Le Séjour (2009) et À – Hommages, adresses, dédicaces, ce nouveau livre est le quatrième de Jacques Goorma qui paraît aux Éditions Arfuyen. Il est publié en partenariat avec le Printemps des Poètes pour illustrer le thème choisi pour 2024, la Grâce, magnifiquement présent dans cet ouvrage.

Spécialiste de l’œuvre de Saint-Pol-Roux, dont il a édité de nombreux volumes chez Rougerie, Jacques Goorma a également publié un ouvrage qui lui est consacré dans la collection Poésie/Gallimard et un Ainsi parlait Saint-Pol-Roux chez Arfuyen en 2022. L’écriture de Jacques Goorma est marquée à la fois par un étroit contact avec la nature et par les grandes traditions spirituelles orientales et rhéno-flamandes.

Ce n’est pas un hasard si figure en couverture de ce nouveau livre l’idéogramme kŏu, en chinois  « bouche ». Ce signe se réfère bien sûr d’abord aux petites ouvertures qui donnent leur titre au livre : cette « petite lucarne / ouverte // au fond /du tableau » qui semble le faire communiquer, comme dans un tableau de Vermeer, avec un autre monde.

Mais ce signe désigne aussi la bouche béante dans l’instant de l’émerveillement : « elle est venue, dit le poète / l’inattendue l’éblouissante // sitôt / disparue ». Innombrables sont ces instants pour qui sait les accueillir et chaque poème en est comme la trace, peut-être aussi la clef. Car, écrit Goorma « nul / ne rencontre le poème // sans / se rencontrer ». Le poème n’est pas simple souvenir, mais principe actif. Il nous aide à voir et à entendre.

Comme le poète, le lecteur qui vit profondément le texte doit pouvoir éprouver lui aussi cette étrange impression : « je m’éveille soudain / regardant tout autour // comme venant / de tomber du ciel ». C’est alors que subitement la lucarne s’ouvre à la vision : « le soir appuie / son front noir // sur la vitre / et te regarde ». Et c’est alors que se fait sensible, dans un parfait silence, le passage de la grâce. Car toujours, rappelle le poète, « l’effroi est /grand ouvert // au vertige / de la grâce. » Et ce sont au contraire l’habitude et le confort qui nous empêchent de la recevoir. Au plus sombre des jours, la grâce reste présente en nous : « par le sourire en nous / de la clarté // la grâce demeure / invaincue ».

   Coll. Les Cahiers d'Arfuyen — 2024 — 128 p — ISBN 978-2-845-90365-4 — 14 €