Image de couverture de Viviane Desmet
Souvenirs d’immensité est un livre singulier dans le travail de Marcel Moreau : à la fois par son caractère directement autobiographique et par sa toile de fond – une longue errance à travers le continent eurasiatique.
Depuis toujours aimanté par l’utopie d’une vie délivrée de toutes les « entraves » sociales, intellectuelles et spirituelles qui l’étouffent, Moreau a réalisé son projet de rejoindre les espaces où elle pourrait se déployer : le fantastique et bien réel pays de la «pensée mongole ».
Ce voyage à la fois imaginaire et très concret est à l’origine d’une immense « prose du transsibérien », notes d’errance à travers Russie et Chine jusqu’au but final : Pékin.
Comme le résumé d’un destin d’écriture, attiré par l’extrême et nourri du plus proche. «Adolescent, écrit-il au début de son récit, je désirais tout sans rêver à rien, sauf au rien de Transsibérien, à commencer par là. Chaque année, j’ajoutais au premier des trains une voiture, repeinte aux couleurs de ma lecture de Gogol, avec les yeux de Raspoutine. Mes instincts avaient leur convoi, ou bloqué dans les glaces, ou violent de vitesses. De Moscou à Vladivostok, je les étirais roulants, sifflants, noirs de la fumée échevelée des bûchers d’autrefois, réactualisés par mon rythme. (…)
« Ce qui m’importait, c’était la démesure du mot : Transsibérien, plus fort que transatlantique ou que transsubstantiation. J’entrais en transes pour Sibérie, déesse froide, inhumaine, pourtant vertigineuse. C’était l’époque où Souvenirs de la maison des morts m’apprenait le bagne à domicile. L’irréchauffable enfer, plein de colosses brisés, à l’enseigne du Knout. J’étais frère en pages tragiques, en signes de souffrance slave, de l’immense Dostoïevski. J’avais de son sang dans mes neiges. »
Coll. Les Cahiers d'Arfuyen – 2007 – ISBN 978-2-845-90104-9 – 12 €