La lecture de Jean Mambrino
Extraits de l’article sur Le tout proche paru dans Études en février 2002
Une poésie de l’intérieur de l’âme. Nue, transparente, inspirée. L’inaccessible est le tout proche. Comme la lumière, « Où chaque feuille / Chaque chose était présente / Resplendissait d’une impassible ardeur // Et qui sans cesse nous échappait ». Dans cette lumière les créatures n’ont plus de nom. « Ton absence est plus belle / Que le jour le plus beau. » Ce rien est pure merveille, pur bonheur.
« Je viens // Dit la beauté / Je viens à toi. » Elle brise tous les murs, et la beauté murmure : «Mon seul soleil // Est ton désir. » « Mais ton désir / Déjà connaît // Ce que veut mon désir. » Et la beauté se cache ainsi dans son obscurité. « Vois // Dit la beauté / Comme le noir // De mes lèvres / Sait épouser // La courbure de tes mots. » Qui parle ? Qui écoute ? « Tant de lumière // Jaillie d’un seul point / Plus vaste que le ciel. » « La lumière / N’est pas plus vaste que ce point. » Le ciel tout entier peut s’y engouffrer. Chaque créature connaît le secret sans le savoir. Même quand le merle fait silence, « Le chant / Ne cesse pas ».
« Si aujourd’hui / Tu ne meurs pas // Tu vivras toujours ». Il suffit de rester dans la danse, dans « l’élan de la grâce », le désir de l’unité. Il ne faut pas pleurer les morts : « Ils vivent / Enfin ». C’est sur nous que nous pleurons. Eux nous voient déjà « comme nous serons un jour ». Ils voient « Dans nos tristesses même / La joie ». Tout vit à jamais dans l’instant. «Nous sommes déjà morts / Déjà vivants. »
Dans l’intimité du tout proche, dont la lumière est invisible, car elle se cache dans la lumière, vers qui tu vas. Tais-toi, dit la beauté, j’entends ton silence. Ce silence est ta parole, ta poésie.