Nous ne voulons pas mourir

Schickele

Wir wollen nicht sterben

Traduit de l’allemand et présenté par Charles Fichter – Prix Nathan Katz du patrimoine 2019.

Le 6 juin 1921, Rilke écrit à sa compagne Baladine Klossowska, qu’il appelle Merline: «Avez-vous lu la prose de Schickele sur son voyage en Alsace et à Paris (chez Barbusse) ? C’est très beau. » Le texte dont Rilke fait un éloge si chaleureux est le deuxième des trois textes qui constituent Nous ne voulons pas mourir, de René Schickele, jamais encore traduit en français.

Romancier, essayiste, poète, Schickele est l’un des grands écrivains germanophones du début XXe s. Intellectuel engagé, il a été un ardent militant pacifiste et a participé à la Révolution berlinoise de Novembre 1918.  S’inspirant des Cahiers de la Quinzaine de Charles Péguy, il a été une figure pionnière d’« écrivain-journaliste » à travers des articles et essais aussi frappants d’intelligence et de lucidité que brûlants de ferveur et d’actualité.

L’éloge de Rilke est d’autant plus frappant qu’il ne concerne pas un roman, une prose poétique ou un recueil de poèmes, mais précisément l’un de ces textes inclassables où Schickele s’affirme comme figure pionnière d’« écrivain-journaliste » : historien et chantre de l’actualité, avec la même force de vision et d’écriture que son inspirateur Péguy.

En 1904, âgé de 21 ans, Schickele dirige à Berlin Das neue Magazin, « à l’extrême-gauche du goût ». En 1910, il écrit à Paris pour la Straßburger Neue Zeitung. Il définit alors l’écrivain-journaliste comme « l’oreille de l’époque » et ce genre littéraire comme «l’automobile de la littérature ». Pendant la guerre, il dirige à Zurich la plus grande revue pacifiste, Die Weißen Blätter, qui publie Zweig et Romain Rolland.

Rédigé entre 1918 et 1921, Nous ne voulons pas mourir analyse les impasses du pacifisme, du socialisme et de l’idée européenne au lendemain de la Grande Guerre et garde un siècle après, face à la montée des nationalismes et des populismes, une terrible actualité.

Le livre se compose de trois textes : « Le 9 Novembre », sur l’échec de la révolution berlinoise de 1918 ; « Le voyage à Paris », sur les contradictions de la gauche d’alors (le texte aimé de Rilke !) ; « Vu du Vieil-Armand », méditation sur Dostoïevski et vision mystique d’une Europe unifiée : « La paix descendit en moi, conclut Schickele, car j’étais de bonne volonté, au moins cela, cela j’en étais sûr. »

C’est ici la première traduction en français d’un texte majeur, d’un point de vue  littéraire comme historique.

Coll. Les Vies imaginaires – 168 p –  2019 – ISBN 978-2-845-90284-8 – 16 €