Armand-Jean Le Bouthillier de Rancé, dit L’ABBÉ DE RANCÉ

1087
(1626 – 1700)

Armand-Jean Le Bouthillier de Rancé est né à Paris en 1626. Il est le second fils d’un conseiller d’Etat secrétaire de Marie de Médicis et reçoit pour parrain Richelieu. Destiné par son père à l’état ecclésiastique, il est tonsuré le 21 décembre 1635, à l’âge de neuf ans, et devient dès l’année suivante chanoine de Paris. Il est pourvu de trois abbayes et de deux prieurés.

Dans le même temps, il accomplit de brillantes études. Il publie a treize ans les Odes d’Anacréon avec un commentaire en grec. Il s’intéresse aux philosophes païens, aux Pères de l’Eglise et à la théologie.  D’esprit vif et combatif, il donne toute sa mesure dans les controverses académiques.

Bien que simple tonsuré, il commence à prêcher à Paris où il s’acquiert une belle réputation. La prédication ne lui fait fait pas délaisser les plaisirs de la chasse, ni ceux de la Cour (il a une liaison avec la duchesse de Montbazon).

L’archevêque de Tours, son oncle, souhaite cependant l’avoir pour coadjuteur. Rancé est ordonné prêtre le 22 janvier 1651 et devient docteur en théologie 1654.

Un événement survient le 28 avril 1657 qui bouleverse entièrement le cours de sa vie : la duchesse de Montbazon meurt, il l’assiste en ses derniers instants. Il fait une retraite à Tours sous la direction du P.  Séguenot, de l’Oratoire. Il lit la Bible, les Confessions de saint Augustin, la vie des Pères. Il se lie avec des religieux de l’Oratoire et des amis de Port-Royal. Le grand Arnault devient son directeur de conscience.

Le 2 février 1660 meurt Gaston d’Orléans dont il était l’aumônier : cette disparition achève de détacher Rancé du monde. Il renonce à ses bénéfices, fait de grandes largesses aux pauvres et se retire chez les Oratoriens de Paris de décembre 1660 à juin 1662. Après un noviciat très sévère à l’abbaye cistercienne de Perseigne, il prononce ses vœux le 6 juillet 1664 et se retire à Notre-Dame de la Trappe 14 juillet suivant.

Il n’y reste que quelques semaines : l’assemblée des abbés cisterciens de la stricte observance lui demandent en effet d’aller à Rome défendre leurs réformes contre l’abbé de Cîteaux. Il obtient gain de cause et peut revenir à la Trappe en 1666. Il y restera jusqu’à la fin de ses jours.

Dès son retour, Rancé établit la réforme à la Trappe. L’extrême austérité de son enseignement mais aussi la rigueur de l’exemple qu’il donne frappent vivement ses contemporains. En réaction contre ses erreurs passées, il insiste sur la nécessité d’avoir le cœur toujours uni à Dieu et condamne le travail intellectuel.

Il entretient toutefois une active correspondance avec les plus grands personnages de son temps et reçoit de nombreuses visites. Bossuet, qui restera toujours son ami, vient le voir à la Trappe au moins huit fois.

Les premiers ouvrages publiés par Rancé concernent exclusivement la réforme accomplie à la Trappe. En 1683 paraît un nouvel ouvrage de Rancé intitulé La sainteté et les devoirs de la vie monastique. Cet ensemble de vingt-trois conférences spirituelles connaît un immense succès mais suscite aussi de vives critiques de la part des Bénédictins et des Chartreux, tout particulièrement choqués par sa condamnation du travail intellectuel.

Mabillon se fait l’interprète de ces critiques dans ses Réflexions sur les devoirs monastiques. Malgré les tentatives d’apaisement de Rancé, la polémique se développe durant plusieurs années. Tout en modifiant la règle de son abbaye sur différents points, Rancé maintient que les moines doivent s’abstenir de toute étude proprement dite.

La réputation de sainteté de l’abbé de la Trappe reste, en dépit de cette interminable querelle, intacte. De partout on lui écrit, on vient le consulter. Vers la fin du siècle, l’hôtellerie de la Trappe reçoit chaque an net près de quatre mille visiteurs…

En mai 1695, Rancé, usé par les mortifications et les maladies, donne sa démission. Il demeure cependant à la Trappe et continue d’y exercer une autorité morale incontestée. Il se consacre désormais à des ouvrages d’inspiration spirituelle.

Il meurt le 27 octobre 1700, couché sur la paille et la cendre. « De toutes les parties de l’Europe, écrit Saint-Simon, on parut sensible à l’envi à une si grande perte. » Et Bossuet : «C’était un autre saint Bernard en doctrine, en piété, en mortification, en humilité, en zèle et en pénitence. »

OUVRAGES PUBLIÉS AUX ÉDITIONS ARFUYEN

Le Soleil et les ténèbres