Postface de Jean-Pierre Lemaire
Traduit de l’anglais par Gérard Pfister en collaboration avec Margherita Guidacci – BILINGUE
Dans sa postface aux poèmes de Jessica Powers, Jean-Pierre Lemaire établit un parallèle entre la Carmélite américaine et sa compatriote Emily Dickinson : « Comme chez Emily Dickinson, écrit Jean-Pierre Lemaire, à qui elle fait irrésistiblement songer, le plus réel est ici atteint sans le secours de l’anecdote ; chaque poème retrace un moment décisif dans l’itinéraire de Jessica, mais se tait sur le décor, les circonstances. Le lecteur est simplement invité à épouser un geste, une attitude à la fois physique et spirituelle, comme dans le poème si tu n’as rien : « Si tu n’as rien, retiens ton soupir : / De tes mains, de ton cceur très haut levés / Offre ton propre vide ! » »
Née en 1906, Jessica Powers, en religion sœur Myriam du Saint-Esprit, est l’auteur d’une œuvre poétique réunie en 1989 sous le titre Selected Poetry of Jessica Powers et traduite ici pour la première fois en français. Une première sélection de ces poèmes avait été publiée en traduction italienne par Margherita Gudacci aux Editions Vaticanes sous le titre Luogo di Splendore (Rome, 1981).
Pour entrer dans la tonalité de cette écriture de haute intériorité, il faut lire le poème «Entrée au Carmel » : « Le jour s’achève avec les derniers mots des Complies. / Une cloche retentit comme une discipline / Contre le tumulte du dedans et du dehors. / Je cherche notre cellule pour prier. Ô Esprit silencieux, / Fais que commence en ma vie le Grand Silence. »
Aucune mièvrerie religieuse dans ces textes, pas de catéchisme ni de prédication. Mais la voix d’une profondeur immédiatement sensible, par sa simplicité et sa gravité. Pas de fioriture, pas d’effets. Jean-Pierre Lemaire le souligne à juste titre : « Jessica Powers, comme Thérèse d’Avila et saint Jean de la Croix, est l’exemple exceptionnel d’une coïncidence des deux vocations : chaque étape de l’itinéraire poétique jalonne une étape spirituelle ; « l’inspiration » y a pour condition radicale l’offrande de son propre vide en vue de l’accueil du Verbe silencieux. Chaque poème marque le retour de ce vainqueur d’une guerre « où le sombre encerclement peut durer bien des jours / Sans un témoin mortel » . Le lecteur bénéficie de sa victoire obscure ; elle lui rouvre l’accès à la chambre intérieure où il entendra « un Cœur intemporel qui bat sous [son] propre cœur ». »
Coll. Les Cahiers d'Arfuyen – ISBN 978-2-903-94149-9 – 7,62 €