Ainsi parlait Georges Bernanos

AP 22 Bernanos

Textes choisis et présentés par Gérard Bocholier

Aussi laïque que Bernanos était chrétien, Camus lui a rendu le plus juste hommage : Bernanos, écrit-il, « mérite le respect et la gratitude de tous les hommes libres. » C’est en cela, en effet, que son œuvre dépasse les modes et les étiquettes.

Bernanos est aujourd’hui à la mode. Longtemps relégué parmi les dinosaures, le voici devenu référence de nos intellectuels, comme Bloy ou Péguy. Son style brillant, sa pensée anticonformiste nous le rendent indispensable face à un monde de plus en plus étouffant.

Bernanos est inclassable dans la littérature française. Il faudrait le comparer seulement à George Orwell (1903-1950) : comme l’auteur de 1984, celui de La France contre les robots est plus qu’un écrivain : un mélange de journaliste et de prophète, un témoin de la dignité de l’homme face à toutes les tyrannies et toutes les lâchetés.

Gérard Bocholier, poète et essayiste, nous fait partager son admiration pour le meilleur Bernanos. En épigraphe de sa préface, il cite cette phrase révélatrice de Bernanos : « Qu’importe ma vie ! Je veux seulement qu’elle reste jusqu’au bout fidèle à l’enfant que je fus. »

D’instinct Bernanos déteste les postes, les fonctions, les honneurs. Tout cela qui ne peut que nous tromper. Nous ne sommes pas faits pour ça. Vivre est une aventure, pas une boutique. Avant que l’argent ne prenne le pouvoir en toutes choses, les hommes le savaient bien : « C’étaient des gens qui savaient vivre, et s’ils sentaient un peu fort la pipe ou la prise, ils ne puaient pas la boutique, ils n’avaient pas ces têtes de boutiquiers, de sacristains, d’huissiers, des têtes qui ont l’air d’avoir poussé dans les caves. »

Bernanos n’a pas de mots assez durs pour ceux qu’il nomme les « réalistes » ou les « cyniques », tous ceux qui apportent leur consentement ou leur soumission au « conformisme universel, anonyme ». Bernanos dénonce les ruses de ce type nouveau d’homme égoïste, logicien, hypocrite, ne vivant que pour le profit et la jouissance. D’où aussi, sur le fond, sa rupture avec Maurras, dont l’esprit lui paraît « absolument dépourvu, dépouillé, destitué de toute charité ».

Polémiste, Bernanos ? Certes il admirait Bloy et sa plume était vive. Mais il détestait ce terme. Bien plutôt un « combattant de l’Esprit », n’écrivant que pour se justifier « aux yeux de l’enfant » qu’il fut et qui ne veut pas mourir « sans témoigner », qui va « jusqu’au bout du vrai, quels qu’en soient les risques ».

Coll. Ainsi parlait  –  2019  –  152 p  –  ISBN 978-2-845-90289-3  –  14 €